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26 mars 2017

Catogan

                                                                          Catogan

                 Un simple ruban redevenu à la mode après plus d'un siècle d'oubli. Par extension ce mot désigne la coiffure ainsi obtenue en nouant quelques mèches de cheveux qu'elle assagit. Pour les filles c'est un bon moyen de discipliner de folles boucles, pour les garçons manière de montrer du caractère en dressant ostensiblement une crinière qu'on se refuse à tondre. L'exact inverse d' une autre mode, militaire celle là, consistant à raser tout ou partie du crâne, ce qui vous ferait ressembler à un bidasse américain en expédition.

                  Le monde des coiffures est partagé, pas seulement par une simple raie. D'un côté les artistes, ou ceux qui se croient tels, refusent de couper les cheveux en quatre et arborent fièrement bouclettes, ondulations, frisettes et franges pas toujours très propres, en signe distinctif de l'état créatif, de l'autre les bourlingueurs adonnés aux salles de sport méprisent tant l'encombrement de leurs ornements pileux naturels qu'ils les coupent à ras, semblables ainsi à des chasse-poux. A ma gauche Antoine tend la main à Ludwig Van Beethoven tandis qu'à ma droite Patton fait la courte échelle au général Bigeard.

                  Pour combler le fossé des allures et des emplois certains tentent maintenant, avec des succès divers, des synthèses ou des audaces extraordinaires. Ainsi voit-on apparaître sur les trottoirs des figures imprévues avec un drôle de visage coupé en deux, parfaitement glabre d'un côté du crâne, abondamment pourvu de mèches soigneusement dressées ou tressées de l'autre. Mieux encore, on croise parfois des jeunes gens qui ressemblent à des sémaphores luisant dans le brouillard d'un soir de tempête, tant leurs cheveux sont colorés. Toutes les teintes sont admises, du jaune paille au violet violent, parfois panachés, sans doute pour relever la fadeur d'une personnalité par l'arrogance du port de tête. De temps en temps le charme est de la partie. Après celà on s'étonne que de malheureux pervers osent encore se retourner sur les femmes en public malgré la proscription d'une telle conduite jugée inconvenante.

                  Moi, je vis ces rencontres un peu comme si La Vie d'Adèle tournait à chaque fois au coin de la rue. Impossible de ne pas croiser le regard, on est séduit, on sourit, on cherche vite un prétexte pour dire quatre mots. Souvent, de cette manière commence une aventure, mais si vous ne voulez pas la rater, je vous conseille de trouver autre chose que de vous extasier sur la séduisante coiffure. Elle ou il est au courant, elle ou il l'a fait exprès, si vous tombez dans le piège de la banalité, il ou elle vous lâchera un regard méprisant et vous tournera le dos avec un dédain insondable et insupportable.

                  Le mépris! Un grand sujet pour trouver le moyen de s'en remettre. L'indifférence stérilise les passions, l'oubli efface les caractères, la haine ne console pas du dépit. Enfin vient un jour, une nuit plutôt, quand les échecs remontent à la surface pour irradier comme les coups accumulés d'une pointe d'épingle sur un coin de votre peau, où votre coeur risque de partir en lambeaux. La solution, n'importe quel psy vous le confirmera, consiste à ne pas prendre la fuite, garder son calme et accepter de l'autre qu'il en passe par toutes les couleurs, comme si c'était vous même qui vous étiez pastissé les cheveux, comme si vous étiez Belmondo peinturluré par Ferdinand dans Pierrot le Fou. L'aventure mérite bien qu'on la regarde en face, dans les yeux. 

                  La coiffure sauvage est de mode. Parfois, quand même, on regrette le sage catogan pour maîtriser les mèches rebelles.

   

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  • Blog des mots. A partir d'une définition de mots simple, ce blog raconte l'actualité, effleure les sentiments, égratigne les gens et les hommes publics tout en s'efforçant de distraire. Gardons le sourire, les temps sont durs.
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