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27 juin 2019

Cassius

                                                                      Cassius

                        On l'a appris un beau matin à la radio, Cassius est mort! Enfin pas vraiment Cassius, un des membres du groupe de musique ainsi nommé. Le pauvre gars serait passé par dessus son balcon qui ne tenait à rien, à peu de choses comme la vie. D'après les nouvellistes atterrés, la planète serait en deuil. Enfin presque toute parce que, pour ce qui me concerne jusqu'à ce matin je ne connaissais de Cassius que l'historien romain du deuxième siècle. A la rigueur, en toute extrémité, j'aurais fait le lien avec le boxeur célèbre qui avait hérité de ce prénom emprunté à l'antiquité par les trafiquants d'esclaves, Cassius Clay.

                        En écoutant les commentaires j'ai beaucoup appris. Ce Cassius nouveau aurait été un des premiers inventeurs de la musique électronique. Connus dans le monde entier, ses rythmes conçus sur des appareils électriques disco auraient agité le monde de la nuit sur tous les continents, déhanché les fêtards en cadence sur les dance floors de Séoul à Ibiza en passant par Soho, avec des noises psychédéliques de la House bien de chez nous, en tout cas c'est dans ces termes que les chroniqueurs annonçaient une perte  inestimable pour la French touch.

                     J'avoue être resté dans l'expectative, baba, scotché, non pas tant par la révélation du drame désolant pour ce pauvre homme, que par l'unanimité complaisante des termes utilisés par les nombreux chroniqueurs bouffis de suffisance anglophile. Eh Quoi! Faut-il avoir peur d'être incompris si on parle du "style maison, des sons électroniques, de l'inventivité des animateurs français, de la musique artificielle adoptée sur les pistes de danse récréatives." Je ne sais pas s'il faut s'en féliciter, il semble bien que les danseurs de la nuit aient une sorte de langage normatif de New York à Tel Aviv ou Delhi.  

                  La mondialisation n'a décidément pas de bornes, ces gens manquent à la fois de créativité et d'originalité. Avec regret nous sommes contraints de constater que les activités artistiques, musique électronique en première ligne, sont victimes de la banalisation et uniformisation générale qui coiffe de son ombre toutes les activités soumises aux échanges internationaux, mercantiles ou pas. Dans leurs appartements les ménagères de Rio, de Harlem, de Dublin ou Taïwan partagent la même marque d'aspirateur tandis que leurs enfants s'agitent la nuit sur des rythmes fabriqués par d'habiles spécialistes, tels Cassius, à l'autre bout de la planète. 

               J'apprends avec curiosité que l'auteur du groupe Cassius, victime du désolant fait divers rapporté ici, était né à Limoges, preuve supplémentaire s'il en était besoin, de la pénétration de la normalisation des moeurs et des techniques jusqu'aux fin fond des provinces. De la Terre de Feu Argentine jusqu'aux banlieues de Dakar on danserait pareil dans les boites disco. Jusqu'à ce jour je gardais au fond de mon coeur l'image d'une capitale de province française pétrie de traditions, gardienne des secrets jalousement défendus de fabrication d'une porcelaine à la finesse inimitable, département dans lequel la population résistante battit en rase campagne l'armée allemande pour s'en libérer.

                  Eh bien, tout ceci n'a plus cours. Si ce n'est déjà fait, la porcelaine pourrait être fabriquée en Chine, les boeufs de Salers disparaître des champs pour se reproduire dans des fermes de mille vaches, la jeunesse désabusée plus préoccupée des tubes électroniques que de patrimoine. Jusqu'où tout celà peut-il aller? Je n'ose l'imaginer. 

                    Dion Cassius, l'historien romain passa dit-on dix ans de sa vie à se documenter sur l'histoire de Rome et autant d'années à écrire l'ouvrage monumental qui sert de référence à tous les connaisseurs des sources du premier empire d'Occident.

                  Hier nous étions les successeurs de la langue et des valeurs de ces estimables ancêtres. Aujourd'hui plus grand chose,... mondialisés, plus rien!

  

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