Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Mots d'ici
7 septembre 2021

Ecolier

                                              En sortant de l'école

             Rage! En cette rentrée des classes  je lis dans les titres du Monde le mot à la mode: learning. L'apprentissage on ne connaît plus ou alors ce serait si long à écrire ou prononcer qu'on se paie un anglicisme. Learning, je ne sais pas ce que vous en pensez, moi je suis ulcéré. Ces emprunts inconsidérés vont-ils finir ? Ce n'est pas grand chose ! On en a vu bien d'autres ! Certes. Mais qu'un journaleux essaie d'attirer l'attention par un tour de langue pareil n'est innocent qu'en appparence. Je suis persuagé qu'il accompagne ainsi l'abaissement de l'usage du langage correct...et qu'il le sait. D'accord, vu l'état de l'enseignement on n'est plus à ça près...Mais si! Justement!  

            Sincèrement je me demande quelles images de leur rentrée les galopins d'aujourdhui conserveront dans vingt ou trente ans et jusqu'à la fin ? Le souvenir du mal au dos en raison d'un sac trop lourd qui dépassait tant leurs maigres épaules qu'il leur faisait une silhouette ridicule. Le désarroi de leur parents collés à la grille de la cour avant de les abandonner à leur tas de fournitures scolaires aussi obligatoires que parfois inutiles. Rien d'autre à retenir? Pas grand chose de sensible dans tous les cas.

            La nostalgie n'est pas de mise, je veux bien le croire. Impossible pourtant d'oublier la tenue sévère des institutrices  d'autrefois, parfois la blouse grise que le maître endossait pour éviter la poussière de craie. Il ressemblait ainsi à ses élèves venus apprendre la lecture à pied, en galoches, culottes courtes sur les genoux et béret de rigueur. Comme on était loin des files de voiture qui font la queue chaque matin pour larguer les élèves devant la grille des cours élémentaires. La classe sentait bon l'anthracite ou le hêtre qui brûlait dans le poêle, les pupitres en bois égratignés ou tachés servaient des générations de potaches. Le maître remplissait à la main les encriers en céramique. On s'appliquait tous les jours sur la copie à la plume sergent-major pour obtenir une écriture parfaite. 

               La vieille école a disparu. Il n'en reste que les murs parfois abandonnés au beau milieu des villages et des quartiers, reconnaissables à l'inscription de leur fronton: "filles" "garçons". Ce ne serait pas si grave si l'état des lieux ne s'accompagnait pas de la fâcheuse impression que l'application et le désir d'apprendre passent trop souvent à la trappe avec les vieux murs. Les ordinateurs contiennent des tas d'informations mais n'apprennent pas l'écriture cursive aux enfants des banlieues. Des connaissances sans doute inutiles puisqu'on les baigne dans le learning cher à notre journaliste. Un peu avant la suppression de la méthode alphabétique pour apprendre la lecture a donné les  résultats qu'on connaît : des générations d'élèves perdus pour la grammaire et l'orthographe. Ne parions pas que le learning aura des effets aussi pervers sur les enfants les plus vulnérables, c'est fait. Sur leurs bureaux en bois mélaminé comment les élèves pourraient-ils apprendre l'humanisme des sentiments chaleureux de préférence à la sécheresse des jeux vidéos ? 

               Le jeudi l'instituteur nous passait des films de Charlot avant de surveiller le goûter. A la sortie de notre vieille école élémentaire tous (ou presque) savaient lire et compter. Une moisson commune de souvenirs et de connaissances rapprochait chacun de l'égalité.  

                Learning. Je n'ai rien contre le progrès mais faut-il tant changer ?  Qui en paiera le prix? les pots cassés? 

Publicité
Publicité
Commentaires
Mots d'ici
  • Blog des mots. A partir d'une définition de mots simple, ce blog raconte l'actualité, effleure les sentiments, égratigne les gens et les hommes publics tout en s'efforçant de distraire. Gardons le sourire, les temps sont durs.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Newsletter
Publicité