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14 juin 2012

Pulsation

                                                           PULSATION

             S’il s’agissait de jazz on parlerait de rythme, de swing peut-être, de tempo à la rigueur. Contrairement à ce qu’on voit, un chef d’orchestre n’est pas muet : j’en connais un qui m’a plus captivé en commentant la pulsation d’une pièce de Verdi qu’en l’exécutant. Du coup je me suis pris à écouter autrement, plus loin, ailleurs, au-delà des notes j’ai balancé mon oreille à la découverte de leur intention, de leur destin presque.

             Les plus grandes œuvres musicales ont une pulsation originale et profonde. Ce n’est pas seulement une banalité que de le dire. Pensez donc. Les discours des hommes politiques ont aussi leur mélodie lorsqu’ils sont bons. Sous le phrasé on devine le souffle, on découvre la perspective, les forte et les piano accompagnent le choix des mots et l’ampleur de la phrase. Ce n’est pas pour rien que les Grecs ont inventé la mélopée qui précède le verbe bientôt suivi par le discours, en un mot la prosodie.

             En ce mai d’élections on se demande si les qualités de l’orateur jouent un rôle déterminant dans le succès. Un tel qualifié de médiocre parleur peut réussir là ou un ténor du barreau fait faillite. Bien évidemment tout dépend de l’attente de l’auditoire. Le public est versatile. Il ne s’agit pas de compliquer le discours face à des gens simples, ou l’inverse, sous peine de décevoir. Je prétends pour ma part que la pulsation personnelle est aussi déterminante que la séduction, la beauté ou l’art de s’habiller avec goût.

             Il y a des propos flamboyants qui font se lever les foules, mais attention, le bonimenteur maîtrise lui aussi le talent oratoire. Il parsème son discours de bons mots qui vous arrêtent à la foire, il suspend et reporte à l’infini sa proposition pour vous garder devant lui et en attirer d’autres, il soutient sa comédie de force gestes et mimiques et, lorsqu’il vous sent à sa main, conclut d’un tel feu d’artifice de mots que vous vous sentez presque soulagé d’arriver à la fin des fins. Son but est atteint : soulager…

             Enfin n’oublions pas les discoureurs creux. Edgar Faure, parlementaire et ministre du dernier siècle triturait la vacuité avec un talent impeccable et un humour impayable. On l’écoutait avec un plaisir d’autant plus grand qu’il n’avait rien à dire. Sérieux de Gaulle ? Rien de moins exact. Cet homme mettait en scène son personnage de sauveur et la délivrance de son message avec un soin du détail digne d’un pensionnaire du théâtre français. Son discours de Phnom Penh est aussi spendidement scandé qu'une tirade de Troïlus et Cressida.

             Et puis ne nous cachons pas qu’il y a aussi des pulsations oratoires néfastes. Les dictateurs n’hésitent jamais à rassembler des foules immenses, ordonnées par des murs de béton et encadrées de murs de policiers, pour leur tenir des discours enflammés. Dans ce cas la pulsation vient autant de l’ordonnance de la foule elle-même que de ce qu’on lui inflige. Les démagogues font alors appel aux instincts, au grégarisme aveugle pour faire le lit douillet de leur pouvoir personnel.

Peuples gardez vous.Gardez vous à droite, gardez vous à gauche.  

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Commentaires
A
Oui, raison gardons, de droite, de gauche, gardons-nous, des tribunes, des tribuns, des pulsations et des pulsions.
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  • Blog des mots. A partir d'une définition de mots simple, ce blog raconte l'actualité, effleure les sentiments, égratigne les gens et les hommes publics tout en s'efforçant de distraire. Gardons le sourire, les temps sont durs.
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